Vendredi 13 janvier 2012, l’économiste Marc Touati livre son analyse pour l’année 2012. A noter que l’analyse a été transmise à la rédaction du site lemediascope.fr à15 h vendredi soit avant l’annonce de la dégradation de la France par l’agence de notation Standart & Poor’s qui avait été anticipée depuis 2010 par l’économiste.
Marc Touati : ¨Perspectives 2012 ? Généralement, les débuts d’année sont toujours propices aux espoirs et aux vœux d’amélioration. Cette année, l’état de l’économie mondiale ne semble guère s’y prêter. Et ce, en particulier dans la zone euro.
En effet, un peu comme en 2009, nous commençons 2012 en pleine récession. Dès lors, afficher des prévisions économiques et financières optimistes apparaît presque impossible.
La deuxième bonne nouvelle de ce début d’année réside
En tout état de cause et même à supposer une embellie miraculeuse de l’économie eurolandaise au cours du second semestre 2012, la baisse du PIB de la zone euro au quatrième trimestre génère mécaniquement un acquis de croissance négatif pour l’année à venir.
Aussi, il est d’ores et déjà certain que la progression annuelle moyenne du PIB en 2012 ne pourra pas dépasser les 0,7 % dans la zone euro et les 0,5 % en France. Dans ce cadre, le taux de chômage va continuer de croître et les déficits publics ne reculeront pas.
Face à ces piètres résultats, il pourrait être tentant de baisser les bras et de se dire que finalement 2012 sera pire que 2011. C’est d’ailleurs le scénario consensuel qui semble s’imposer.
Pourtant, comme nous l’avons souvent souligné, la prévision consensuelle est souvent la plus mauvaise. Voilà pourquoi, en dehors de la récession eurolandaise et française, 2012 pourrait tout de même réserver quelques bonnes surprises.
La première est déjà perceptible puisqu’il s’agit de la résistance de l’économie américaine. En effet, après avoir nettement rebondi en 2010, puis ralenti en 2011, la croissance semble retrouver de belles couleurs outre- Atlantique. Mieux, après une année de déceptions, le taux de chômage a retrouvé le chemin de la forte baisse dès la fin 2011.
L’évolution des enquêtes ISM des directeurs d’achat dans l’industrie et les services montrent d’ailleurs que cette embellie devrait se prolonger au moins jusqu’à l’été 2012.
La croissance américaine résiste bien.
Par la suite, l’approche des élections présidentielles réservera forcément son lot d’attentisme, mais sans susciter un ralentissement trop prononcé.
Au total, la croissance américaine devrait avoisiner les 2,4 % sur l’ensemble de 2012.
La deuxième bonne nouvelle de ce début d’année réside dans la bonne tenue de la croissance chinoise. En effet, après avoir fait craindre le pire, cette dernière s’est stabilisée autour des 9 % en 2011 et devrait en faire de même en 2012.
De quoi rappeler que les Chinois restent maîtres dans l’art du « fine tuning » (le réglage fin).
L’an passé, ils ont effectivement décidé d’apprécier le yuan de manière à éviter la surchauffe.
Le ralentissement de l’économie chinoise est donc voulu et non subi. Pour autant, avec un niveau de 6,4 yuans pour un dollar, le renminbi reste encore très loin de son niveau d’équilibre (en l’occurrence 3,50 yuans pour un dollar selon la parité des pouvoirs d’achat).
La Chine contrôle son ralentissement.
Source :Bloomberg
De plus, avec plus de 3 200 milliards de dollars de réserves de changes, la Chine pourra soutenir l’activité en cas de besoin. Autrement dit, en dépit d’un ralentissement salutaire et contrôlé, la croissance chinoise restera comprise entre 8,5 % et 9 % en 2012.
Parallèlement, l’ensemble des pays émergents devrait profiter de la bonne tenue des deux premières économies mondiales et ce d’autant qu’après s’être appréciées exagérément, leurs devises commencent à revenir vers des niveaux plus normaux. Cette évolution permettra donc de soutenir leur activité en 2012, comme par exemple au Brésil.
PIB brésilien en glissement annuel Real contre dollar
Source :Bloomberg
Il s’agit d’ailleurs de la troisième bonne nouvelle de ce début d’année, en l’occurrence l’appréciation du dollar et, son corolaire, une accalmie des cours des matières premières.
En effet, c’est grâce à ce mouvement que la croissance mondiale va progressivement se rééquilibrer. Et ce, non seulement pour les pays émergents, mais aussi et surtout pour la zone euro.
Ainsi, grâce au retour de l’euro vers son niveau d’équilibre (en l’occurrence 1,20 dollar pour 1 euro) d’ici l’été prochain, l’économie eurolandaise pourra progressivement retrouver de l’allant et sortir de la récession.
Seule La baisse de l’euro permettra de sortir de la crise.
Indice de sentiment économique dans la zone euro Euro/dollar en échelle inversée Dec
Source : Eurostat, Bloomberg
Cela permettra notamment de stopper le dangereux découplage qui s’est installé depuis l’été 2011, entre la résistance des économies américaines et chinoises et l’effondrement de celle de la zone euro. Ainsi, sur une croissance mondiale de 3,5 % tant en 2011 qu’en 2012, la contribution de la zone euro n’a été que de 0,2 point l’an passé et sera d’au mieux 0,1 point cette année.
A titre de comparaison, la contribution de la Chine a été de 1,2 point sur ces deux années et celle des Etats-Unis passera de 0,4 en 2011 à 0,5 point cette année.
Si les dirigeants de la zone euro se décident enfin à choisir le camp du pragmatisme en 2012, alors l’UEM pourra enfin retrouver le chemin d’une croissance durablement proche des 2 %,pour 2013-2014. Mieux vaut tard que jamais…
Marc Touati
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