Dans un entretien au Figaro.fr Karel Lannoo, directeur du centre de recherche européen CEPS, explique comment arrêter les attaques par les marchés à l’encontre des pays de la zone euro devenus un à un des maillon faibles.
Leur fragilité est illustrée par la Grèce, l’Irlande, bientôt le Portugal et peut-être l’Espagne … chacun attaqués à leur tour, l’Irlande et bientôt le Portugal feront appel au Fonds d’aide européen.
« On aurait pu éviter une telle contagion. »
Karel Lannoo – On aurait pu éviter une telle contagion. Si l’Europe n’avait pas commis de grandes erreurs de communication. Une bonne dizaine de responsables européens, dont la parole a un poids pour les investisseurs, ont exprimé publiquement leurs divergences. Ce qui a fait bouger les marchés.
( …) Il est vrai que les hommes politiques ne comprennent pas comment fonctionnent les marchés. Ils savent d’ailleurs à peine comment ils fonctionnent.
Le Figaro : Sauver le Portugal permettrait-il de ne pas à avoir à sauver l’Espagne ?
Karel Lannoo : Les banques espagnoles sont très présentes au Portugal. Et Les banques allemandes, elles, ont une exposition conséquente en Espagne. Venir en aide à l’un revient donc à aider l’autre. La décision sur l’Irlande répondait à la même logique : il fallait sauver l’Irlande pour sauver le Royaume-Uni (même si ce dernier n’est pas dans la zone euro).
Le Figaro : Pourquoi la panique se répand-t-elle si rapidement entre les pays de l’Union européenne ?
Depuis des années les investisseurs se diversifient grâce à la libéralisation des capitaux en Europe. Avant, les banques et les assureurs devaient s’acquitter de pénalités quand elles investissaient hors du marché local national. Aujourd’hui, la zone euro est considérée comme un marché unifié et local. Les investisseurs européens ont donc placé leurs billes dans tous les États membres.
Or, nous avons libéralisé les capitaux sans coordonner nos politiques budgétaires, nos marchés de l’emploi, nos politiques fiscales, etc. En bref, sans avoir de gouvernement économique. Résultat, chacun agit dans son coin, sans se soucier des conséquences. Un exemple: au lendemain de la faillite de la banque Lehmann Brothers, l’Irlande a annoncé qu’elle garantissait à 100% ses banques. Voyant cela, le Royaume-Uni n’a eu d’autres solutions que de faire de même. Et aujourd’hui, les États européens doivent soutenir l’Irlande et ses banques.
Le Figaro :Comment arrêter cette contagion ?
Pour commencer, il faut que l’Eurogroupe parle d’une seule voix. Mieux: il faut instaurer un black-out et laisser seule la Banque centrale européenne (BCE) s’exprimer. C’est la seule qui comprend les marchés. Et, lorsque ces derniers seront calmés, les fondamentaux économiques, qui ne sont pas mauvais, reprendront de l’importance.
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