Trois jours avant le début du G8 de l’Internet prévu mardi, un document du Quai d’Orsay indique que l’Élysée aurait fait annuler, selon Marianne, un colloque sur la liberté d’expression et la protection des cyberdissidents prévu en octobre 2010.
Selon l’hebdomadaire Marianne Nicolas Sarkozy aurait mis fin en septembre au projet du ministre Bernard Kouchner à l’époque des Affaires étrangères, de protéger, quelques semaines avant la révolte des pays arabes, les cyberdissidents qui souhaitent l’instauration de la démocratie dans leurs pays.
Selon Marianne «l’Élysée ne veut pas entendre parler de cyberdissidence,
ni de liberté d’expression, il veut du “contrôle”».
Cette annulation du colloque voulue par Bernard Kouchner sur la liberté d’expression en ligne aurait été à l’origine de la rupture entre les deux hommes.
Bernard Kouchner prônait alors la «liberté d’expression» et les «droits de l’Homme» dans l’espace numérique tandis-que Nicolas Sarkozy lui aurait opposé la «cybercriminalité», les «zones de non-droit», et la nécessité de «réguler» Internet pour en faire un lieu «civilisé».
Les documents de Marianne, indiquent que le projet de Bernard Kouchner était avancé.
Le rôle déterminant joué par Internet et plus précisément les réseaux sociaux au cours de la révolte en Iran qui allait ensuite s’étendre, n’avait pas échappé au ministre des Affaires étrangères dès le début de l’année 2010.
Marianne explique «l’idée de base est simple. Il y a désormais 2 milliards d’internautes et le numérique doit devenir un outil central du soft power, l’influence par la persuasion.»
Deux tribunes dans Le Monde et le New York Times sont publiées en mai 2010 par le ministre des Affaires étrangères.
Bernard Kouchner y indique «Internet est l’outil le plus formidable de mise à bas des murs et des frontières qui enferment. Pour les peuples opprimés, privés du droit de s’exprimer et de décider de leur avenir Internet apparaît comme un atout inespéré.»
Selon Bernard Kouchner les cyberdissidents «doivent bénéficier du même soutien que les autres victimes de répression politique» et qu’il faut «conférer -à Internet- un statut qui le rapproche d’un espace international, afin qu’il soit plus difficile pour les Etats répressifs d’utiliser l’argument de la souveraineté contre les libertés fondamentales.»
Marianne explique qu’en juillet 2010 après une réunion à Paris qui rassemblait 17 pays, des ONG et des experts, Bernard Kouchner a annoncé dans un document confidentiel que la France allait «soutenir les cyberdissidents confrontés à la répression de la liberté d’expression» par une «assistance technique» destinée à contourner la censure dont certains dissidents sont l’objet.
Cette initiative du ministre français reçoit le soutient du ministre néerlandais des Affaires étrangères qui cosigne une lettre officielle destinée à 20 gouvernements étrangers, dont les États-Unis.
Selon Marianne, la date du 29 octobre est choisie pour une grande conférence internationale sur la liberté sur Internet qui devait être «l’apogée de la carrière de Kouchner» selon l’hebdomadaire.
Or Nicolas Sarkozy souhaite favoriser les thèmes tels que «le respect du droit d’auteur», la criminalité, l’économie sur la toile et l’indique dans une lettre du 29 septembre reprise par l’association la Quadrature du Net.
Pour le chef de l’état «il ne serait pas concevable que l’Internet se développe comme une zone de non-droit» et souhaite que la conférence ait pour thèmes «des initiatives de régulation équilibrées prises par la France», «la loi Hadopi» avec pour objectif «un Internet civilisé».
Marianne précise «l’Élysée ne veut pas entendre parler de cyberdissidence, ni de liberté d’expression, il veut du “contrôle”».
Cette lettre aura pour conséquence d’être «un point de non-retour dans les relations entre Sarkozy et Kouchner».
Bernard Koucher quittera le gouvernement le 13 novembre et en décembre 2010, en Tunisie, Mohamed Bouazizi s’immole par le feu à Sidi Bouzid ce qui donnera lieu à une mobilisation sans précédant sur les réseaux sociaux pour dénoncer les régimes en place qui allait être suivie par les départs de Ben Ali puis de Moubarak.
La semaine prochaine, le G8 de l’Internet sera essentiellement orienté vers l’aspect économique et aura notamment pour invités, des entrepreneurs tels les patrons de Facebook (Mark Zuckerberg), de Google (Eric Schmidt) ainsi que Jeff Bezos qui évoqueront «la croissance économique», «les infrastructures de demain», ou «la propriété intellectuelle à l’heure du numérique» indique le programme.
Les représentants d’Orange, SFR, Vivendi, Alcatel-Lucent, Mozilla et Gaumont devraient également participer à la discussion ainsi que Rupert Murdoch, le magnat de la presse.
Le forum sera lancé dans la matinée du mardi 24 Mai par le Président français Nicolas Sarkozy.
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