L’économiste Marc Touati a commenté vendredi 9 septembre 2011 les chiffres du déficit extérieur hexagonal « un nouveau record ».
Marc TOUATI : A l’évidence, la conjoncture économique française n’avait pas besoin de ça. Après deux mois de baisse, le déficit extérieur hexagonal est reparti à la hausse en juillet, à 6,46 milliards d’euros.
Si le record historique d’avril dernier (à 6,9 milliards d’euros) n’a pas été dépassé, ce triste résultat montre néanmoins que le déficit commercial de la France semble avoir trouvé un nouveau point d’ancrage mensuel autour des 6 milliards d’euros.
D’ailleurs, au cours des douze derniers mois, ce déficit atteint le niveau vertigineux de 67,21 milliards d’euros, un record absolu.
Sources : INSEE, Datastream
Bien entendu, pour expliquer ce nouveau dévissage, certains ne manqueront pas d’évoquer la forte augmentation des importations, notamment de produits pétroliers. Pour autant, la réalité est tout autre : la cause profonde du déficit extérieur abyssal de la France est structurelle. Elle réside notamment dans le manque de compétitivité de l’économie française dans son ensemble.
Cette carence fondamentale connaît trois manifestations principales.
Primo, la spécialisation sectorielle et géographique des exportations française est mauvaise. En effet, ces dernières sont trop peu focalisées sur les biens d’équipement (seulement 22 % de nos exportations, contre 50 % outre-Rhin) et sur les pays en forte croissance (notamment dans le monde émergent).
Notre premier partenaire commercial reste ainsi la zone euro, qui est la lanterne rouge de la croissance mondiale depuis dix ans.
Secundo, les importations françaises demeurent trop fortes, notamment parce qu’il existe trop de produits qui ne sont plus fabriqués dans l’Hexagone. En d’autres termes, la production nationale répond de moins en moins aux besoins de consommation des Français.
Tertio, les coûts de production, les contraintes réglementaires et la pression fiscale sont tellement forts dans l’Hexagone qu’ils incitent de plus en plus les entreprises françaises à produire à l’étranger. De la sorte, de plus en plus de produits de marque française sont vendus à travers le monde, y compris en France, mais sont fabriqués à l’étranger.
Dans ce cadre, tant que l’économie française n’aura pas été modernisée en profondeur, le déficit extérieur français restera pléthorique.
La remontée de 1,5 % de la production industrielle en juillet n’y change d’ailleurs pas grand chose. En effet, cette progression ne fait que corriger la baisse de 1,5 % qui avait été enregistrée en juin. De plus et surtout, l’évolution des dernières enquêtes menées auprès des directeurs d’achat dans l’industrie françaises montre que cet dernière devrait connaître une décrue sévère en août septembre et certainement au-delà.
Sources : INSEE, Bloomberg
A court terme, les conséquences de ce déficit historique concerneront évidemment la croissance qui, après avoir été nulle au deuxième trimestre, risque bien de devenir légèrement négative au troisième trimestre. Au final, la progression annuelle du PIB français en 2011 sera donc très loin de l’objectif gouvernemental de 2 % et avoisinera dans le meilleur des cas 1,6 %. Il faut donc également se préparer à un déficit public et à un taux de chômage plus élevés que prévu….
Marc TOUATI
Partager : |
|
Tweet |
|
|
|