Le chirurgien français Jacques Bérès 71 ans co-fondateur de Médecins sans frontières puis de Médecins du monde, entré clandestinement à Homs bastion de la contestation syrienne a soigné les habitants de la ville martyre. Il témoigne dans Le Point. Extrait.
Interrogé sur la façon dont il a pu rentrer à Homs, Jacques Bérès répond :
J’ai été pris en charge par une filière de médecins syriens, de la frontière libanaise jusqu’à une localité du nom d’al-Qusayr, à 15 kilomètres de Homs. J’ai ensuite été emmené par l’opposition elle-même jusqu’à un autre village, à deux kilomètres de la ville.
Des milliers et des milliers de bombardements de mortiers. Des trous dans les maisons. Des immeubles qui brûlent. Des voitures qui continuent à cramer. Des rues désertes et les snipers.(…)
Interrogé sur ce qu’il a pu faire sur place, il répond :
Le peu que je sache faire, à savoir de la chirurgie de guerre. Je soignais les séquelles des bombardements. Mais malgré le dévouement des habitants, les conditions étaient très mauvaises. Je ne parle même pas de stérilisation.
La plupart étaient des civils, de vieilles personnes, des femmes, et des enfants. Je me suis également occupé de soldats de l’armée syrienne libre, qui ne sont en fait qu’une émanation du peuple.
« On ne pouvait rien faire pour les blessés
de la tête et de la poitrine »
Techniquement, on ne pouvait pratiquement rien faire pour les blessés de la tête et de la poitrine, qui étaient condamnés à mourir. On ne pouvait secourir que les plaies de l’abdomen, les perforations intestinales, les artères ou les membres.
(….) Les vrais hôpitaux ne servent qu’à l’armée du régime. Je traitais mes patients dans des maisons privées, mises à disposition par l’opposition. La liste de médicaments qui manquent est énorme. À ce stade, le plus important est d’avoir la base : la nourriture, l’électricité et l’eau. Pour avoir de l’électricité, on a besoin de générateurs qui marchent, et donc de diesel. Il manque tout, il faut faire avec le reste….)
Sur les 89 personnes que j’ai pu soigner, neuf sont malheureusement décédées. Concernant le nombre total de morts, l’opposition donne des chiffres avérés, prononcés nominalement par les muezzins. Elle en recense près de 10 000. Mais ce chiffre est forcément inférieur à la réalité, car il ne prend pas en compte les disparus. Je pense donc qu’il y a quelques milliers de victimes en plus.
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